Lors de mes premiers pas dans Cruelty Squad, j'étais partagé entre l'envie de fuir des graphismes vraiment repoussants et le désir de découvrir ce qui se cachait derrière un jeu aussi fascinant. Je me demandais si, à force de persévérance, je finirai par donner un sens à ce que je voyais. Après 20 heures et les 2 fins visionnées, je peux répondre sans hésitation : non, je ne comprends toujours rien à Cruelty Squad.
Alice aux pays des cauchemars
Avec ses textures grossières et son amour pour la résolution 640x480, Cruelty Squad ressemble fortement à un mod de Quake sous LSD. Je vous renvoie aux captures d'écran pour que vous vous rendiez compte du niveau de mauvais gout qui nous est proposé et croyez-moi sur parole, la partie audio est tout aussi horrible. En tout cas, on ne peut pas lui reprocher son manque de personnalité ! Cruelty Squad est en effet un jeu bien à part, qui est bourré d'idées complètement folles.
L'action se situe dans un univers vaguement cyberpunk qui ne rappelle pas vraiment à la représentation habituelle que l'on peut trouver dans un Cyberpunk 2077 par exemple. Cruelty Squad en coche bien certaines cases. Il se déroule notamment dans une sorte de dystopie capitaliste dans laquelle le meilleur moyen de devenir riche est de spéculer en bourse via un menu dédié accessible à tout moment. Cependant, les clichés volent en éclat lorsqu'on regarde de plus près les implants que l'on peut acquérir à prix d'or. Si certains restent classiques, beaucoup ne sont pas mécaniques, mais plutôt organiques.
Ainsi, l'amélioration qui permet d'effectuer des doubles sauts consiste en une série de trous dans notre talon qui propulse une ignoble substance verte à chaque fois qu'on l'utilise. De même, l'excellent grappin destiné à explorer les hauteurs est un gigantesque intestin externe... Il est également possible de régénérer ses points de vies en mangeant des cadavres et on peut alors en profiter pour récupérer les organes et les revendre au marché noir…
Si on peut raisonnablement rêver de posséder le bras argenté de Johnny Silverhand, on imagine difficilement ressentir autre chose que du dégout pour les modifications corporelles de Cruelty Squad qui pourraient provenir tout droit d'un film de Cronenberg. L'univers du jeu est cauchemardesque, on pourrait presque sentir l'odeur de la chair pourrie qui semble dégouliner de partout, jusque dans le contour de l'écran, sans arrêt présent.
James Bond 420
Concernant le gameplay, on incarne un assassin engagé pour s'occuper de diverses personnalités sans trop poser des questions. Après des briefings aussi cyniques qu'obscur, on nous invite à explorer les niveaux relativement grands de façon libre. Les emplacements de nos cibles sont indiqués à tout moment, mais la route à emprunter est totalement ouverte. C'est là que Cruelty Squad nous montre qu'il n'est pas qu'une enveloppe de couleurs criardes, mais qu'un vrai jeu se dissimule à l'intérieur.
D'une part, les sensations de tir sont très bonnes et les armes sont satisfaisantes à utiliser. D'autre part, le level design est très réussi, les chemins alternatifs sont nombreux et deviennent très intéressants dès que l'on commence à utiliser des possibilités de déplacement supplémentaires. En plus de nous offrir d'autres manières d'accéder à nos cibles, les lieux cachés fourmillent et permettent de débloquer de nouvelles améliorations, voir des niveaux secrets. On trouve également des armes qu'on pourra obtenir de façon permanente si on parvient à terminer la mission avec.
Ca ne sera pas toujours une tâche simple cependant, car Cruelty Squad est brutal et on y meurt très rapidement. La difficulté des combats n'est pas le seul obstacle et sa principale caractéristique est d'être un jeu réellement obscur. Sans avoir besoin d'évoquer les graphismes à nouveau, tout est bizarre dans ce jeu et on va de surprise en surprise. On est propulsé dans un monde étrange et il ne faut pas avoir peur d'expérimenter pour tenter de le comprendre mieux. Les implants en sont une bonne illustration et il va être compliqué de deviner à quoi servent certains sans les essayer, et même en les essayant, ce n'est pas toujours clair.
L'histoire est dans un esprit similaire et les derniers niveaux deviennent encore plus abstraits au lieu de nous offrir des révélations. Et vous savez quoi ? J'adore ça. Si la partie shoot/infiltration est excellente et que la liberté proposée est très rafraichissante, ce qui m'a tenu en haleine, c'est vraiment l'envie de découvrir ce qui se cachait dans ce monde... Que sont ces monstres à tête de fleur ? Pourquoi ma vision se tord dans tous les sens par moment ? Comment ouvrir ces mystérieuses portes ? Les questions apparaissent sans arrêt et n'ont pas toujours de réponse, mais font de ce jeu une curiosité particulièrement fascinante.
Conclusion
Cruelty Squad est un FPS à l'ancienne vraiment qui cache bien son jeu, offrant beaucoup de possibilités et de contenu.
Si vous parvenez à passer outre ses graphismes, vous pourrez alors découvrir un jeu difficile mais intriguant, rempli de surprises plus bizarres les unes que les autres.